LA VIE D'UN SQUAT

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LA VIE D'UN SQUAT
 
C'est g?n?ralement apr?s une expulsion, et souvent une s?rie
d'expulsions, qu'un nouveau squat se constitue. Il n'est d'abord qu'un
dortoir pr?caire, par crainte d'une nouvelle expulsion qui peut venir
d'un jour ? l'autre. Si l'expulsion ne vient pas, les habitants
s'installent, et la vie s'organise.
Un ou plusieurs foyers apparaissent, si l'espace est suffisamment grand
un peu ? l'?cart des endroits o? on dort. C'est autour de du feu que
l'on se rassemble, que l'on discute, qu'on partage le th? et le caf?,
qu'on cuisine, qu'on re?oit les gens venus en visite. On mange assis par
terre, un peu plus loin. Un endroit le plus ? l'?cart possible est
sacrifi? pour servir de WC. Un autre espace sert ? entasser les
d?tritus, puisque la mairie ne ramasse pas les poubelles devant les
squats.
Pr?caire et dans le d?nuement, la vie s'organise donc, avec des rep?res
et un minimum de stabilit?, qui apportent un sentiment de s?curit?
minimum pour ne pas se d?truire.
 
Expulser, c'est jeter ces personnes dans l'incertitude non pas du
lendemain mais de l'endroit o? ils pourront chaque nuit, peut-?tre
dormir. C'est le manque de sommeil qui s'accumule puisque la police
d?loge la nuit sous les ponts et dans les parcs et expulse au petit
matin ceux qui ont r?ussi ? s'abriter dans un endroit discret, et qui
s'additionne ? l'angoisse et ? la perte de rep?re. La traque de lieu en
lieu apr?s expulsion peut dur?e plusieurs semaines. Dans le langage des
organisations de d?fense des droits de l'homme, on appelle ?a traitement
inhumain et d?gradant, il s'agit de d?truire l personnalit? sans tuer la
personne.
 
Le squat de la rue Mouron ?tait d'un d?nuement total, et la pr?sence
d'un important stock d'alcool n'arrangeait pas les choses. Mais comme
disent ses habitants en apprenant leur expulsion prochaine : ? m?me l?
on ne nous laisse pas vivre ?. C'est une vie collective qui s'?tait
tiss?e dans ce lieu, et que l'expulsion va d?truire, sans offrir aux
expuls?s autre chose que l'errance.