Décès de Baudouin P., deux mois après avoir été discriminé par Brussels Airlines et agressé par la police fédérale
Dans un communiqué² publié suite à l’annonce du décès, les proches de Baudouin rappelaient les faits : « Le 4 décembre dernier, Baudouin Pandikuziku embarquait à bord d’un vol de Brussels Airlines à destination de Kinshasa. Ce qui aurait dû être un simple voyage s’est transformé en cauchemar lorsqu’une hôtesse de l’air lui a demandé de se chausser. Baudouin Pandikuziku s’était déchaussé pour pouvoir mieux supporter le vol à cause de la rétention d’eau dont il était sujet. Devant son incapacité immédiate à répondre à cette demande, la situation a rapidement dégénéré. Les hôtesses de l’air ont contacté la police. […] L’intervention policière qui s’en est suivie a été d’une brutalité extrême et inouïe à son encontre.»
La vidéo prise lors de l’intervention contient en effet des images très violentes. Baudouin exprimait dans un témoignage les lourdes séquelles qu’il endurait depuis : douleurs, double fracture au bras, ecchymose à l’œil impactant sa vue, ainsi que des angoisses constantes ou des terreurs nocturnes liées au traumatisme psychologique.
L’écrasante machine policière à l’œuvre
Les faits ne se limitent pas à cette seule agression. Alors qu’il était déterminé à dénoncer les violences qu’il a subies, Baudouin a découvert qu’il était lui-même accusé par les auteurs de ces violences. La police l’accusait de « rébellion non armée, violations du droit aérien, racisme et discrimination ». Selon les policiers qui ont mené l’intervention, en dépit des images filmées et malgré les multiples traumatismes dont Baudouin a été victime, ce serait donc lui le « suspect».
Le cynisme policier n’ayant pas de limite, Baudouin s’est retrouvé face à l’un de ses agresseurs lors de l’audition à laquelle il était convoqué en tant que « suspect ». De quoi mettre en doute la supposée « impartialité » du système judiciaire.
Le retournement de la culpabilité est une pratique policière bien connue. On se souvient par exemple du traitement judiciaire et médiatique de l’affaire Mawda, cette petite fille kurde de 2 ans tuée d’une balle policière dans la tête lors d’une course-poursuite en 2018. Les premières versions (honteusement mensongères) des autorités relayaient alors la prétendue responsabilité des parents dans ce drame, niant la cause évidente de la mort par balle de la part de la police. Les victimes décrites comme les coupables.
On se souvient aussi de ces jeunes personnes racisées, issues de quartiers populaires, tuées lors d’interventions policières : Adil en 2020, Mehdi en 2019, Sabrina et Ouassim en 2017, … Dans chacun des cas, la défense de la police repose sur l’idée que les victimes étaient coupables, pour justifier la violence de leurs interventions. Et les médias relaient des portraits criminalisants de ces jeunes.
Ce que l’on a coutume d’entendre qualifié de « bavure » policière semble en réalité tout le contraire d’une « erreur regrettable » ou d’une « faute lourde », mais bien, au contraire, des exemples illustrant les mécanismes bien huilés de l’impunité policière.
Brussels Airlines : une entreprise coloniale dans son ADN, avec la police fédérale comme bras armé
Les faits subis par Baudouin Pandikuziku se sont déroulés à bord d’un avion de la compagnie Brussels Airlines, qui est par ailleurs bien connue pour son implication dans les politiques migratoires racistes³. Si l’entreprise se revendique « spécialiste de l’Afrique », elle est tout autant spécialiste des expulsions. La compagnie se charge en effet régulièrement de déporter des personnes détenues en centres fermés, le plus souvent sous la contrainte. Les personnes victimes de ces expulsions font état de multiples violences physiques et psychologiques par la police fédérale, avec la complicité active des compagnies aériennes. Certains témoignages révèlent que des employé·es de la compagnie vont parfois jusqu’à se rendre dans les centres fermés afin de mettre la pression aux personnes détenues pour qu’elles ne résistent pas à leur expulsion.
Les implications de la compagnie aérienne dans le système détention-expulsion de la Belgique n’ont en réalité rien d’étonnant lorsqu’on se penche sur son historique. Brussels Airlines a en effet été fondée dans la continuité de la Sabena, société ayant pris part à l’entreprise coloniale belge dès 1923. C’est aussi dans un avion de la Sabena que Semira Adamu a perdu la vie en 1998, étouffée par les gendarmes qui l’escortaient lors de sa sixième tentative d’expulsion.
Brussels Airlines avait déjà du sang sur les mains. Le 4 décembre 2024, la compagnie s’est rendue une fois de plus complice de violences racistes d’État.
Toutes nos pensées et notre soutien vont vers les proches de Baudouin. Comme toutes les autres victimes des violences policières, il ne sera pas oublié. Ni oubli, ni pardon.
Ensemble, marchons à Bruxelles contre les violences et répressions qu’impose la police : rendez-vous le samedi 15 mars (14h, place du Luxembourg), pour la manifestation internationale contre les violences policières⁴.
#JusticePourBaudouin , #StopRacismedÉtat, #AbasLInjusticeDueAuxViolencesPolicières
#JusticePourTous·tes , #NonAuxViolencesPolicières
² https://stuut.info/Deces-de-Baudouin-Pandikuziku-une-violence-policiere-aux-consequences-5784
³ https://www.revue-ballast.fr/machine-a-expulser-brussels-airlines-a-la-manoeuvre/
⁴ https://stuut.info/Manifestation-internationale-contre-les-violences-policieres-5854
Geen opmerkingen:
Een reactie posten