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dinsdag 9 september 2014

Belgium : Entretiens avec Jacques: Après huit tentatives d’expulsions il se retrouve à Kinshasa FR/NL‏

FR
http://www.gettingthevoiceout.org/entretiens-avec-jacques-apres-huit-tentatives-dexpulsions-il-se-retrouve-a-kinshasa/

NL
http://www.gettingthevoiceout.org/please-translate-in-nl_be-entretiens-avec-jacques-apres-huit-tentatives-dexpulsions-il-se-retrouve-a-kinshasa/

Engl: Who can translate?????



Le 3 septembre 2014


Kinshasa

Monsieur Jacques est arrivé en Belgique en 2005. Il y a passé six
années. Il était arrivé avec un visa touristique. Il rejoignait sa
famille, dont sa mère et son frère qui résidaient déjà en Belgique. Il
n’avait pas de papier et travaillait au noir. Il n’avait pas de
sentiments de peur, mais ressentait un manque de considération du fait
de sa situation illégale. Cependant, il dit qu’il n’était pas mal vu,
car il faisait des boulots « sans problèmes ».

Monsieur Jacques a été arrêté à l’aéroport international de Bruxelles en
2011. Il revenait d’un voyage familial au Maroc. Il voyageait seul, mais
ne fut pas le seul arrêté dans cet avion. Les agents de l’immigration
lui ont interdit de rentrer, on lui a dit qu’il n’avait pas le droit de
venir en Europe. Les agents lui ont demandé de le suivre, il l’a fait de
bon coeur, il se sentait innocent. Il ne comprenait pas vraiment
pourquoi on l’arrêtait, il pensait pouvoir circuler librement, il avait
déjà fait d’autres voyages mais au sein de l’Europe. Il a été emmené
dans la zone de détention de l’aéroport, appelée le 127. Les agents de
l’office des étrangers qui le détenaient lui ont indiqué qu’il pouvait
introduire une demande d’asile, sans quoi, il serait rapatrié vers le Maroc.

Il introduit des demandes d’asile depuis le centre qui seront toutes
refusées malgré un changement d’avocat. Le motif du refus : demande non
fondée. Pourtant, M. Jacques fait partie des opposants au régime en
place en RDC, il vient d’une famille mobutiste, résidant dans le
quartier Ma Campagne à Kinshasa (quartier connu pour regrouper les
mobutistes).

M. Jacques est resté 6 mois en centre fermé. Il a fait deux mois et demi
au 127, pour être ensuite transféré deux mois au 127 bis et finir son
incarcération au centre de Bruges (1 mois et demi). Il était en contact
avec l’association CRER par téléphone, ainsi qu’avec Getting the Voice.
Il n’a jamais vu ses interlocuteurs, mais a passé beaucoup de temps au
téléphone avec eux et en parle très chaleureusement. M. Jacques, ayant
des contacts réguliers avec les associations a subi des pressions dans
les centres. « si on te trouve avec le numéro de Getting, tu as beaucoup
de problèmes ». Il a dénoncé une tentative d’expulsion d’une personne
séropositive. Le centre a caché le détenu lorsque les associations
accréditées à visiter les centres sont venues se renseigner à ce sujet.
Il pense qu’à cause de ses contacts avec les associations, l’office des
étrangers a pressé son dossier.

Jacques a subi 8 tentatives d’expulsion dont la dernière fut concluante.
Il est rentré 4 fois jusqu’à l’avion. Jusqu’au dernier moment, il
pensait qu’il pourrait rester en Belgique. Il pense que s’il avait eu un
meilleur avocat dès le début il aurait pu avoir un titre de séjour légal.

Jacques trouve qu’il était apprécié par les agents du centre, certains
ont même gardé contact avec lui. En raison de sa résistance aux
déportations, il fut très apprécié par les autres détenus, qui lui
faisaient une fête à chaque fois qu’il revenait de l’aéroport. Il n’a
jamais été isolé avant d’être déporté.

Lors de son expulsion, M. Jacques a été emmené pieds et poings liés,
bras collés contre le corps, ceinture au ventre et casque sur la tête.
On l’étranglait, on l’insultait, on le menaçait de lui faire des piqures
pour dormir si il ne gardait pas son calme. Il garde des séquelles de
son étranglement dans le cou. Il a été apporté dans un vol collectif, «
l’avion du roi » où une trentaine de personnes l’attendaient déjà. Dans
ces personnes, 4 femmes dont une mineure, un Angolais ainsi qu’une
résidente française à qui on avait volé les papiers. Autour de lui il
décrit une centaine de policiers, des médecins, des assistants sociaux «
à la solde de l’office », des militaires, des psychologues. Tout le
monde était attaché au décollage, les gens ont été détachés après une
trentaine de minutes, lui, a attendu plus d’une heure, il était assis
entre deux policiers de taille importante.

Arrivé à Kinshasa, on le met, avec les autres personnes déportées, dans
une voiture de la HIACE. Il est escorté par les agents de l’ANR (agents
nationaux résidentiels) jusqu’à la direction générale de ce service. Ce
lieu est situé tout proche de la résidence du président Laurent Désiré
Kabila. On les laisse trois jours sans manger, sans boire, sans se
laver, ils pouvaient sortir dans une cour sécurisée à raison de deux
heures par jour. Dans ce lieu, ils étaient enfermés avec des opposants
au régime politique. La prison comprenait 4 à 5 cellules remplies
chacune d’une quinzaine de personnes. Quand il pose la question au
gardien « où sommes-nous ? », on lui répond « quoi ? Vous ne savez pas
où vous êtes ? Vous êtes prisonniers du président ». « Ici, personne ne
peut vous libérer à part lui ».

Après les trois jours dans la prison, un gardien vient le trouver pour
lui dire que le président à décidé de les libérer. On lui indique qu’il
n’a pas intérêt à se retrouver dans un mouvement d’opposition au régime,
qu’ils connaissent son nom et son adresse et qu’ils le poursuivraient
jusqu’à la fin. Il a l’interdiction formelle de parler de l’existence de
la prison ainsi que de ce qu’il a vu à l’intérieur. Les gardiens
l’emmènent à l’extérieur. On lui offre à boire et à manger. Après un
moment, ils se lèvent, ils disent qu’ils partent et que les détenus sont
libres et autorisés à contacter leurs familles. Un dernier conseil, qui
ressemble plus à un ordre avant de les quitter, ils doivent s’affilier
au parti PPRD. Il reçoit la carte d’un des responsables qui lui propose
de l’appeler au cas où il aurait besoin.

Ils appellent la famille. Sa grande soeur vient le chercher et
l’accueille dans une chambre de la maison du père décédé.

Le retour est encore plus dur que la vie enfermée. La famille est déçue
qu’il revienne dans des circonstances imprévues et les mains vides.
Comme on sait qu’il n’a rien, on ne lui met pas la pression pour qu’il
participe aux ressources de la famille, mais on ne le considère plus non
plus. « C’était comme si je n’existais plus, on disait que je ne servais
à rien, que je ne faisais rien, on ne me parlait plus ». Comme la
famille s’attendait à recevoir de l’argent et à le voir revenir fier, on
accuse d’autres membres de la famille de l’avoir ensorcelé. Seules 2 ou
3 personnes gardent un contact avec lui, « je me suis consolé tout seul ».

Certaines personnes déportées à Kinshasa, pour éviter de vivre la honte
auprès de leur famille, ne les appellent pas quand ils se font déporter.
Ils cherchent d’abord à trouver un peu d’argent et une valise pour ne
pas vivre ce rejet.

Certains travailleurs du centre fermé ont appellé Jacques, pour lui dire
qu’elles étaient déçues de la décision de son dossier, qu’ils ne
trouvaient pas ça juste, mais que c’était leur travail. Il a gardé
contact avec les associations, une militante est venue le voir pour
faire un reportage filmographique.

Actuellement, M. Jacques n’est pas dans une situation confortable, il
compte regler des affaires d’héritage et repartir en Australie ou en
Autriche. L’ambassade d’Autriche se trouve au Kenya, son voyage
commencera donc par là.

Plus d’infos sur l’accueil des expulsés en RDC
http://bxl.indymedia.org/spip.php?article3432
http://www.theguardian.com/uk-news/2014/feb/16/congo-torture-asylum-seekers


Source : Getting the Voice Out 

http://www.gettingthevoiceout.org/entretiens-avec-jacques-apres-huit-tentatives-dexpulsions-il-se-retrouve-a-kinshasa/

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